Quatrième de couverture :
En plein essor du journalisme embarqué, dépêcher un reporter pour battre le record du tour du monde était une bonne idée. Envoyer une femme en était une meilleure encore. Lorsque Nellie Bly entreprend sa circumnavigation en novembre 1889, elle part entièrement seule, chargée d’un unique sac à main de voyage. Son objectif : battre le record fictif de Phileas Fogg, le héros britannique du roman de Jules Verne, Le Tour du monde en 80 jours. Costume de voyage – cape, veste bleue à col haut, jupe, long manteau de laine à gros carreaux et mallette de cuir – Nellie Bly boucle en 72 jours une ode à l’audace et à la détermination sans jamais se départir de son impeccable autodérision.
Après 10 jours dans un asile, le succès inouï de cette nouvelle aventure consacre la figure de Nellie Bly comme symbole de la lutte pour l’émancipation des femmes et pionnière du journalisme d’investigation.
Éditeur : Éditions du sous-sol
Nombre de pages : 172
Prix : 16,00€
Mon Avis :
Nellie Bly est l’une des précurseur du journalisme d’investigation : à la demande du rédacteur en chef du New York World, Joseph Pullitzer, en 1887, elle se fait volontairement interner dans un asile psychiatrique pendant dix jours. Son but : dénoncer les conditions effroyables de détention des malades souffrant de symptômes psychiques ainsi que les méthodes douteuses du corps médical. Ses articles auront l’effet d’une bombe : peu de temps après, les asiles psychiatriques connaîtront une réforme en profondeur.
En 1889, Nellie Bly réitère avec les défis : cette fois, elle se mesure à un personnage fictif, Phileas Fogg, héros du Tour du Monde en Quatre-vingt jours de Jules Verne, paru en 1872. Elle propose alors au rédacteur en chef de son journal de faire elle-même le Tour du Monde, seule et en moins de temps que Phileas Fogg, soit en 75 jours.
Rédacteur en chef du New World : « Vous n’y arriverez jamais! Vous êtes une femme, vous aurez besoin d’un protecteur, et même si vous voyagiez seule, il vous faudrait emporter tant de bagages que cela vous ralentirait. En plus, vous parlez uniquement l’anglais. Rien ne sert d’en débattre : seul un homme peut relever ce défi. »
Nelly Bly : « Fort bien! Alors je partirai en même temps que lui pour le compte d’un autre journal et soyez sûr que je le battrai. »
Rédacteur en chef : « Vous en seriez fort capable. » (P.12)
Du 14 novembre 1889 au 25 janvier 1890, Nellie Bly parcourt ainsi le monde en 72 jours, 6 heures, 11 minutes et 14 secondes et 40070 kilomètres, battant son objectif de départ. Cette circumnavigation la rendra célèbre à plus d’un titre et renforcera sa popularité.
Le tour du monde en 72 jours est composé des récits de voyage rapportés par Nellie Bly, en personne, et agrémenté des coupures de journaux du New York World de l’époque. Le style est assez fluide et je dois dire que j’ai suivi avec grand plaisir notre héroïne dans son périple. Je l’ai trouvé extrêmement attachante dans sa simplicité, sa fraîcheur et sa gentillesse autant que dans son esprit fin et combatif. Elle possède également beaucoup d’autodérision et même les péripéties de son voyage ne lui font pas oublier son humour!
« Le bruit courait qu’un Jonah était à bord. Je me demandais bien qui était ce Jonah, jusqu’à ce que les marins m’apprennent que c’était ainsi qu’ils surnommaient les singes! D’après eux, un singe sur un bateau attire le mauvais temps. Un des membres de l’équipage exigea que l’on jette l’animal à la mer. (…) Puis, un autre marin lança que Jonah désignait également un pasteur. Or, nous en avions deux sur l’Océanic! Je déclarais que si le singe devait passer par-dessus bord, alors les saints hommes connaîtraient le même sort. Le débat fut clos, et mon petit compagnon eut la vie sauve. » (P. 162)
Nelly Bly est aussi une femme moderne qui ne se départ en aucun cas de son esprit féministe et libertaire. Il est ainsi arrivé plusieurs fois qu’elle s’insurge contre les conditions des femmes au cours de son périples : pas seulement en Chine, où les femmes condamnées subissaient de bien plus atroces tortures que les hommes pour un même crime commis mais aussi en Europe, lorsqu’une jeune femme respectable et non mariée se devait de sortir accompagnée d’un chaperon…
Bien que le récit de Nellie Bly soit marqué par une grande ouverture d’esprit et une volonté de découvrir le monde, la lectrice du XXIème siècle que je suis, n’a pu s’empêcher d’avoir quelques objections. En effet, au XIXème siècle, le Monde était encore très nettement fracturé entre les Pays Occidentaux et les Pays dits « colonisés » par les premiers. Le comportement des Occidentaux (Anglais, Américains, Français, etc…) vis à vis des populations Locales était donc très empreint de supériorité, voire d’irrespect. Qui aujourd’hui oserait pénétrer dans un Temple bouddhiste en Inde ou en Chine et refuser de retirer ses chaussures? Qui oserait frapper un individu en Égypte parce que ce dernier aurait eu l’audace de vous arnaquer?
Enfin, il est dit que Nellie Bly est la première femme occidentale à faire le Tour du Monde seule, avec un unique bagage. Là, je ne peux m’empêcher d’émettre quelques réserves. Il est vrai que la notion de « femme seule » peut différer entre le XIXème et le XXIème siècle. Mais, à la lecture du récit de Nelly Bly, il ne m’a pas semblée qu’elle ait été seule à un moment donné. Elle était constamment en compagnie d’Occidentaux dans les transports en commun (train et bateau) ou accompagnée d’un guide-traducteur dans les pays visités. De plus, elle était également dispensée des tracas administratifs (passeport) ou de l’achat de billets, son guide s’occupant des formalités.
En conclusion, Le tour du monde en 72 jours par Nellie Bly est un récit de voyage passionnant mais aussi très révélateur de l’état d’esprit des contemporains du XIXème siècle. J’ai donc très envie de prolonger le plaisir et de me plonger dans son précédent opus 10 jours dans un asile.
Je la connaissais pour son « séjour » en asile et le scandale auquel cela a donné lieu (je dois avoir ce livre quelque part, il faudrait que je le recherche… et le lise !) mais pas pour ce tour du monde et ce défi lancé à un monde occidental très machiste. Je trouve qu’avec le temps, reviennent sur le devant de la scène des histoires de femmes qui ont bravé les interdits de leur temps et essayer de vivre la vie qui n’était réservée qu’à la seconde moitié de l’humanité, celle du genre masculin…
Je partage tes réserves, mais n’aurait-ce pas été le cas aussi pour un gentlemen ? aurait-il été acheté ses tickets et voyagé en solitaire ? Je ne sais. Mais ton questionnement est tout à fait légitime et fondé.
Un bel article !
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Merci beaucoup Liza, c’est très gentil de ta part. J’ai réservé dans ma bibliothèque justement 10 jours dans un asile. Je vais aller le chercher demain!^^
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Cela donnera lieu à d’autres discussions ! Je vais aller voir si je peux remettre la main sur le mien ! 😉
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Ça te dirait de faire une lecture commune? Actuellement, je suis sur le tome 1 des Outrepasseurs mais je peux l’achever pour la fin de la semaine et commencer 10 jours dans un asile, la semaine suivante?
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Impossible de remettre la main sur ce livre. J’ai dû le prêter ou on me l’a emprunté sans que je le note. Je vais faire le tour de mes amis pour savoir qui l’a et le récupérer. Sinon je suis partante pour une LC. Par contre je suis sur la Horde du Contrevent en ce moment et je ne l’aurai pas fini semaine prochaine, mais en fonction, je le mettrai en stand by…
Je te tiens au courant. 😉
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Coucou Liza, prend ton temps et ne te stresse pas. J’ai un mois pour lire 10 jours dans un asile et vu qu’il est court… En attendant je dois finir le tome 1 des Outrepasseurs et recommencer depuis le début Ariosto Furioso. Donc, j’ai un peu de temps devant moi! 😉
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ça me laisse le temps de mener mon enquête… et de finir la horde. 😉
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Oui, pas de problème! Tiens-moi au courant!
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Ok ! Pas de soucis !
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