#PLIB2020 : La Croisade éternelle (T.1) de Victor Fleury

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Quatrième de couverture :

Au coeur de la capitale d’un empire millénaire, la prêtresse Nisaba est la principale servante de l’héritier royal, Akurgal. La jeune femme a de quoi haïr la famille régnante, même si elle est forcée de servir son maître sans protester. Or celui-ci est réputé pour sa décadence, utilisant sans mesure ses oblats, des esclaves sacrés dont il s’est approprié les sens grâce à ses pouvoirs mystiques – ces derniers sont contraints de partager ses sensations, douleur, plaisir, mémoire et plus encore.
Mais quand Akurgal décide de partir en croisade aux confins de l’empire, Nisaba se voit obligée de le suivre en laissant son propre fils derrière elle. Alors que secrets et complots semblent se multiplier dans l’entourage de son maître, la prêtresse esclave parviendra-t-elle à le protéger, et à sauver l’empire tout entier de la ruine ?

Editeur : Bragelonne

Nombre de pages : 381

Prix : 22,00€

Date de publication : 10 Avril 2019

#ISBN9791028110345

Mon Avis :

J’ai trouvé ma rencontre avec Victor Fleury assez cocasse aux Imaginales 2019! En effet, alors que le premier jour, je me baladais entre les tables de dédicaces, Victor Fleury m’a alpaguée pour me présenter les univers de ses romans. C’était assez culotté de sa part et en règle général, je ne suis pas très réceptive à cette méthode. Mais, j’ai trouvé l’écrivain tellement passionné et passionnant que je lui ai pris non pas un mais deux romans : le premier tome de La cité éternelle pour moi et L’empire électrique pour mon compagnon. Et devinez quoi? La détermination de Victor Fleury a payé car me voilà conquise par son roman!

La cité d’Ubuk est en pleine effervescence : elle s’apprête en effet à célébrer l’intronisation du Prince Héritier Akurgal, fils de la Reine Prêtresse Kutha. Et cette cérémonie a son importance car elle permet de perpétuer la dynastie des Enléïdes d’essence divine. Or le matin de la cérémonie, Akurgal est introuvable. Furieuse, la Reine Prêtresse charge l’esclave de son fils, Nisaba de le retrouver. Cette dernière est l’oblat de peau d’Akurgal, c’est à dire qu’elle est liée à lui en ressentant toutes les sensations de son maître. Après avoir exploité son « don », elle ne tarde pas à le retrouver dans l’un des bouges de la cité en « charmante compagnie ». A grand peine, Nisaba parvient à le faire retourner au Palais mais la cérémonie a déjà commencé et il semblerait que la Reine-Prêtresse, lasse des excès de son fils, a décidé d’introniser quelqu’un d’autre…

Un univers original

Je suis de plus en plus à la recherche de romans de Fantasy qui sortent des sentiers battus et je dois dire qu’avec le premier tome de La croisade éternelle, j’ai été bien dépaysée. En effet, l’univers est directement inspiré de la civilisation mésopotamienne et cela est assez rare pour le signaler. Il me semble toutefois que le roman de Xavier Mauméjean, Car je suis légion s’inspire aussi de cette civilisation mais je ne l’ai pas encore lu. Pour en revenir à Victor Fleury, d’après ses remerciements présents à la fin de son roman, il s’est basé sur l’ouvrage La Mésopotamie : de Gilgamesh à Artaban de Bertrand Laffont et Aline Tenu pour construire son univers. Et cela se ressent dans la géographie (la cité d’Ubuk ferait référence à celle réelle d’Uruk, les deux fleuves Purat et Idiglat au Tigre et à l’Euphrate et le Golfe du Dilmun au Golfe Persique) mais aussi dans la religion (présence de ziggourat, sorte de pyramide à degrés dans laquelle se déroulaient les cultes religieux ou le dieu Enle du roman qui ferait directement référence à celui de la mythologie mésopotamienne, Enlil).

Le système de magie est également très bien pensé : les Enléïdes ont la possibilité d’avoir des oblats, c’est à dire des être humains asservis capables après une cérémonie de partager leur sens. Par exemple, Akurgal en possède six : un pour la mémoire (Ibbi), une pour la peau (Nisaba), un pour la puissance (Damiq), un pour le sommeil (Nanshê), un pour les yeux (Yaggid) et le dernier, je tairai son identité pour ne pas spoiler une partie de l’intrigue. Cela permet d’accroître la puissance d’Akurgal : il peut ainsi voir à travers les yeux de Yaggid ou partager la force physique de Damiq. Mais, cela a aussi des effets parvers car Akurgal a un peu trop tendance à se reposer sur ses oblats et en devient paresseux (ainsi quand Ibbi se documente, ses connaissances profitent aussi à son maître).

Des personnages très bien nuancés

Assurément, l’un des points forts du roman est le travail sur les personnages. En effet, ils sont loin d’être manichéens. Je prendrai ainsi deux exemples :

  • Nisaba est la narratrice du roman et le lecteur éprouve pour elle beaucoup d’empathie, notamment au début du roman. Par exemple, elle est l’oblat de peau d’Akurgal et ressent donc toutes les sensations de son maître notamment lorsque ce dernier passe ses nuits à forniquer dans les bordels de la cité. Pour anesthésier ses sens, elle utilise une drogue forte, le kûat qui la rend complètement dépendante et amenuise aussi ses capacités. De plus, son fils lui a été retirée par la Reine-Prêtresse et il ne sait pas qui est sa véritable mère. Nisaba a l’autorisation de le voir une fois par mois et est présentée comme une enseignante. Toutefois, elle possède aussi une part d’ombre et ses actions passées seront découvertes par le lecteur au fur et à mesure du récit. On sait seulement qu’elle s’est vengée, que la Reine-Prêtresse lui voue une haine féroce et qu’Akurgal, autrefois son amant, lui a sauvé la vie.
  • Le personnage d’Akurgal est assez surprenant également. Il apparaît au début du roman comme irrespectueux (envers sa mère, son épouse légitime ou ses oblats), dépravé (débordement dans les bordels de la ville), égoïste (il ne pense pas à ses oblats qui souffrent de ses frasques), paresseux (Ibbi ou Damiq apprennent à sa place), inconstant (ne respecte pas sa parole donnée au dieu Anka) et arrogant (il humilie constamment les représentants des peuples soumis). Bref, le stéréotype même du gosse de riche pourri-gâté! Pourtant, Victor Fleury arrive à nuancer ce personnage car en réalité, Akurgal souffre de manque d’amour de sa mère tout d’abord qui ne croie pas en lui et de Nisaba, autrefois son amante. De plus, après avoir été désavoué par la Reine-Prêtresse, il décide de mener une campagne militaire afin de retrouver ses faveurs. Et je dois bien avouer qu’il m’a parfois surprise par sa bravoure, notamment lorsqu’il affronte les bateaux des marchands meluhhates spoliés de leur bien.

Mais un rythme assez déséquilibré

Si j’ai adoré l’originalité de l’univers à travers des petits détails disséminés ça et là dans le récit ou les personnages très humains et bien nuancés, je dois bien avouer que ma lecture a souffert de quelques longueurs. En effet, le premier tiers est consacré à la plantation du décor et le second à la campagne militaire d’Akurgal mais cette dernière se révèle assez répétitive finalement. En effet, le Prince avant de se rendre dans les montagnes de l’Est passe par plusieurs étapes et à chaque fois est reçu par les dignitaires des villes parcourues. Or, ce dernier répète inlassablement  les mêmes erreurs en étant arrogant et en commettant catastrophe sur catastrophe (il courrouce le dieu Anka, il s’aliène les marchands meluhhates ou traite avec condescendance un militaire aguérri, le Shakanaz Vaduz).

Heureusement, le dernier tiers est beaucoup plus dynamique et je dois dire que les révélations sur l’auteur des trahisons à l’encontre d’Akurgal ainsi que la découverte du passé de Nisaba y sont pour quelque chose. Enfin, le roman finit sur un cliffhanger à la « Gabriel Katz » qui donne bien envie de poursuivre avec le second tome.

En conclusion, ce tome d’introduction tient toutes ses promesses : d’un univers original inspiré de la civilisation mésopotamienne (assez rare pour être signalé!) aux personnages nuancés et humains qui possèdent tous leur part d’ombre. Bien que les deux premiers tiers souffrent de quelques longueurs à mon goût (en raison de la mise en place du décor et du caractère répétitif des bourdes d’Akurgal), en revanche, le dernier tiers beaucoup plus dynamique explose par ses révélations! Je suis très contente d’avoir rencontré Victor Fleury aux Imaginales et je suivrai désormais de près son actualité.

Autres Avis : 

Apophis

Boudicca

Xapur

16 commentaires

  1. (merci pour le lien)

    Une belle découverte pour moi aussi. J’y suis allé parce que ça sortait des sentiers battus, et j’en suis ressorti enchanté par la balade.
    Bravo pour ta critique très détaillée et très juste !

    Aimé par 2 personnes

  2. Comme je viens de le dire chez Lutin, ce livre semble remporter l’enthousiasme général des lecteurs, un peu à l’image de l’auteur finalement. Il est parti pour durer sur la scène de l’Imaginaire francophone. Hâte de le lire avec tous vos avis positifs !

    Aimé par 1 personne

  3. Chouette la rencontre ! Moi aussi j’ai bien l’intention de suivre cet auteur, et je ne suis pas étonnée que tu le présentes comme quelqu’un de passionné, cela se ressent dans ses textes. L’empire électrique m’a totalement séduite, alors je ne vais pas hésiter une seconde pour lire ses autres titres 😉

    Aimé par 1 personne

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