L’héritage du Rail (T.2) de Morgan of Glencoe

Quatrième de couverture : 

Alors que la nouvelle se répand en Keltia, Yuri, ramenée de force à l’ambassade du Japon, est déterminée à reprendre sa liberté malgré tout. Mais comment fuir, et où trouver refuge ? Seul le Rail semble désormais capable de lui donner asile…

Editeur : ActuSF – Collection Naos

Nombre de pages : 466

Prix : 17,90€

Date de publication : 25 Septembre 2020

Mon Avis : 

J’avais déjà beaucoup apprécié le premier tome, Dans l’ombre de Paris. Aussi, lorsque Jérôme Vincent que je remercie au passage ainsi que les éditions ActuSF, m’ont proposé en Service Presse la suite L’héritage du Rail, je n’ai pas hésité à le prendre. Et je ne regrette pas mon choix car ce second tome a été une lecture très agréable.

Avertissement : Mon résumé-maison comporte un spoiler inévitable du premier tome. Aussi, si vous n’avez pas lu ce dernier, je vous conseille de passer directement à l’analyse du roman.

L’Héritage du Rail débute exactement là où s’était achevé Dans l’ombre de Paris. Après l’opération sanglante du Roi de France dans les égouts de Paris pour récupérer la princesse Yuri, la petite communauté des Rats panse ses blessures. Les rares survivants pleurent leurs morts et leurs rendent un dernier hommage. Quant aux enfants qui ont pu se cacher, ils sont emmenés en sécurité sur le territoire de Keltia. Yuri a été récupérée par son père, l’Ambassadeur du Japon en France et la jeune fille doit désormais suivre sa destinée en épousant le Prince Louis-Philippe. La version officielle de sa disparition fait état d’un enlèvement par les rats d’égouts et sauve ainsi l’honneur de la jeune fille. Mais, cette dernière ne l’entend pas de cette oreille et souhaite prendre sa vie en main. Elle s’enfuit alors une seconde fois et trouve refuge au sein de la communauté du Rail, censée être indépendante par rapport à la Triade…

Les défauts du premier tome effacés

Dans ma chronique Dans l’ombre de Paris, j’avais évoqué deux défauts principalement :

  • Morgan Of Glencoe insère des dialogues et des chansons en anglais car il s’agit de la langue officielle de Keltia. Or, Dans l’ombre de Paris, ces parties n’étaient pas traduites ce qui pouvait créer quelques difficultés pour les personnes non anglophones. Erreur réparée dans L’Héritage du Raildes notes de bas de page donnent la traduction des dialogues.
  • J’avais également regretté un certain manichéisme entre la communauté utopique des Rats des égouts et la Triade plus autoritaire dans son fonctionnement et la maîtrise de son pouvoir. Là encore, cet écueil est évité dans L’héritage du Rail et les personnages qu’ils soient Fourmis ou membres de la Triade sont plus nuancés et sont capables de commettre de bonnes comme de mauvaises actions.

Des valeurs positives mises en avant

Morgan of Glencoe continue de développer des valeurs déjà évoquées dans le premier tome :

  • Le féminisme notamment avec la présence de personnages féminins forts et courageux comme la Capitaine du Rail, Trente-Chênes respectée pour ses compétences et son charisme, Yuri qui décide de devenir indépendante et d’apprendre par elle-même ou le garde du corps hybride Levana qui possède de hautes compétences martiales. 
  • Des personnages LGBT+. SPOILER : Yuri entretient une relation homosexuelle avec une fourmi du Rail.
  • Le vivre ensemble : les Fourmis qui travaillent de concert sur le Rail sont d’origines différentes (humains, fées, etc…) et forment une communauté soudée et solidaire ; ils font preuve d’une grande cohésion de groupe. A travers l’utilisation de différentes langues comme le français, l’anglais et le japonais, l’autrice transmet également des valeurs d’universalité auxquelles je suis très sensible (je travaille dans un service des Relations Internationales).

Enfin, dans L’héritage du Rail, l’autrice va encore plus loin puisqu’elle dénonce les relations toxiques basées sur la possession d’autrui et la domination de l’autre.

La Reine à son fils Louis-Philippe :

« Apprenez donc ceci, si c’est la seule leçon que je dois vous donner : si vraiment vous aimez une femme, laissez-le vivre, aimez-la libre, et ne tenez jamais ni son coeur ni son corps pour acquis. C’est ainsi que vous vivrez, non avec un bel objet pendu au bras, mais dans une relation avec une personne pour vous aimer en retour et vous épauler. C’est ainsi que l’on aime, lorsque l’on est un homme, et non plus un enfant. » (P. 275)

Au contraire, elle met en avant les valeurs de solidarité, de bienveillance, d’acceptation de soi et d’accomplissement personnel. Cela peut sembler naïf ou idéaliste mais en cette période troublée, il est plus que nécessaire de remettre en avant ces valeurs pour non seulement pacifier les relations avec les autres mais se sentir en paix avec soi-même. Une personne heureuse et accomplie aura un impact forcément positif sur celles et ceux qui gravitent autour d’elle. De cela, j’en suis persuadée.

Trente-Chênes à Pyro : 

« Alors, tu ne peux pas construire ta vie sur la vengeance, la haine ou la colère. Une vie, ça se construit sur des passions, des talents, du travail et des rêves. Ça se construit sur des relations, des amitiés, des collaborations. Et les échecs, aussi, parfois. » (P. 388)

Un tome riche et étoffé

Le roman se base sur un univers uchronique solide et développé : même s’il s’agit d’un décor de fond, on sent que l’autrice y a mûrement réfléchi. Si on commence à avoir un bel aperçu du Royaume de France et de sa société, L’héritage du Rail est également l’occasion de faire une incursion dans le territoire de Keltia (qui correspond peu ou prou à l’Angleterre) et dans l’Empire du Japon. Le mystère demeure toutefois autour du Sultanat ottoman mais je ne doute pas que le troisième tome permettra de s’y intéresser de plus près.

Ce tome est également l’occasion de révélations sur le passé des personnages plus âgés notamment les relations qui lient le père de Yuri, la mère de Louis-Philippe et le père adoptif de Bran. Là encore, l’intrigue qui se noue entre les différents personnages montre une complexité dans les relations et prouve une certaine maturité dans le jeu d’écriture de Morgan of Glencoe.

En conclusion, L’héritage du Rail est une uchronie encore plus réussie que le tome précédent :

  • Les écueils que j’avais soulevés dans le premier ont été effacés (textes en anglais désormais traduits en notes de bas de page, personnages et situations plus nuancés).
  • Les valeurs positives (féminisme, personnages LGBT+, vivre ensemble, bienveillance, solidarité, accomplissement personnel, etc….) déjà mises en avant Dans l’ombre de Paris sont non seulement encore une fois présentes mais également plus développés.
  • L’univers est encore plus complexe et fait montre d’une qualité d’écriture et d’une réflexion poussée de la part de l’autrice.

Bien que ce tome soit très étoffé (plus de 460 pages au compteur), je n’ai pas vu les pages défiler et je l’ai lu en deux jours. Bref, j’ai grand hâte que le troisième tome soit publié!

Autres avis : 

Les chroniques du chroniqueur

L’ours inculte

11 commentaires

  1. n’est-ce pas un roman qui se laisse dépasser par les « valeurs positives » ? je te demande cela, car parfois, les romans essaient de cocher toutes les cases et il y a une impression quelque peu artificielle.
    Pour l’instant, Les Terres Fracturées de Jemisin est le seul qui coule de manière très naturelle dans ce que j’ai lu.

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