Les tambours du Dieu noir (suivi de L’étrange affaire du Djinn du Caire) de P. Djéli Clark #ProjetOmbre

Quatrième de couverture : 

À La Nouvelle-Orléans, devenue un territoire neutre cerné par une guerre de Sécession interminable, Jacqueline ne rêve que d’une chose : laisser derrière elle sa vie de pickpocket afin d’explorer le monde à bord d’un dirigeable. Une fresque multilingue puissante et colorée, aux parfums d’épices créoles, mêlés de magie vaudoue et de mythologie africaine. La novella Les Tambours du dieu noir est suivie de la nouvelle L’Étrange Affaire du djinn du Caire.

Editeur : L’Atalante

Nombre de pages : 144

Prix : 12,90€

Date de publication : 15 Avril 2021

Mon Avis : 

Je remercie le libraire Mathieu ainsi que les éditions de l’Atalante pour m’avoir envoyée ce Service Presse. J’avais repéré la sortie des Tambours du dieu noir sur le Blog d’Apophis et suite à ses chroniques positives sur les deux textes, j’étais très enthousiaste à l’idée de découvrir la plume de Phenderson Djéli Clark. C’est pourquoi avec Célindanae, nous avons décidé d’en faire une Lecture Commune. Et pour ma part, j’ai apprécié ma découverte littéraire : 

Le recueil Les tambours du dieu noir regroupe une novella et une nouvelle :

  • La première éponyme se déroule dans la Nouvelle Orléans, en 1880. Jacqueline surnommée « LaVrille » est une jeune orpheline des rues qui a trouvé refuge près des murs de la ville et qui servent à l’occasion de débarcadères pour les dirigeables. Un jour, elle surprend une conversation entre trois hommes : ils attendent ainsi l’arrivée d’un scientifique prêt à leur donner une arme redoutable (le « Tonnerre de Shango » appelé aussi « Tambours du dieu noir » en échange d’un trésor). Elle sait que ce tuyau vaut de l’or et décide de se rendre dans un bordel pour le vendre à la capitaine du Détrousseur de minuit, Ann-Marie St. Augustine…
  • L’étrange affaire du djinn du Caire prend place en Égypte, en 1912. Fatma el-Sha’arawi fait partie du ministère de l’Alchimie, des Enchantements et des Entités surnaturelles. Elle est un jour appelée sur une affaire peu banale : un djinn a été retrouvée mort et selon toute vraisemblance, il se serait suicidé. Mais, est-ce vraiment le cas? Accompagnée de l’inspecteur Aasim Sharif, ils mènent ensemble l’enquête…

Deux univers uchroniques

Les deux textes appartiennent au genre de l’uchronie, c’est à dire qu’un point de rupture a provoqué l’émergence d’une nouvelle ligne temporelle bien distincte de notre Histoire :

  • Dans Les tambours du dieu noir, il y a en fait deux points de rupture :
    – Le premier a lieu à la fin du XVIIIème siècle – début du XIXème siècle : dans notre Histoire, les esclaves de la colonie de Saint Domingue se sont révoltés contre les Français et le conflit a perduré de 1791 à 1804 avec la fondation de la République d’Haïti. Dans la novella, il y a également eu une révolte et cela a abouti à la création des Îles libres mais le conflit a duré moins longtemps. En effet, les navires de Napoléon ont été anéantis par une arme redoutable nommée « Tonnerre de Shango » du nom d’un dieu africain dédié au vent et aux tempêtes. 
    – Le second trouve son origine pendant la Guerre de Sécession. Pour rappel, dans notre Histoire, elle a opposé deux camps de 1861 à 1865 : ceux de l’Union composée d’Etats du Nord des Etats-Unis industriels, libéraux et anti-esclavagistes aux Confédérés représentés par les Etats du Sud (dont la Louisiane fait partie) plus agricoles, conservateurs et esclavagistes. Dans la novella, la Louisiane est devenue un territoire neutre depuis que les esclaves se sont révoltés contre les Confédérés durant la première année du conflit. Cette paix toute relative (et fragile!) surnommée armistice d’Antietam Trois, est maintenue par des entités étrangères constituées d’Haïtiens, de Britanniques et de Français.
  • Dans L’étrange affaire du djinn du Caire, le point de rupture a eu lieu dans les années 1880. En effet, un mystique du nom d’Al-Jahiz a ouvert un passage entre différents mondes dont celui des Djinns des contes arabes. Ces derniers ont alors investi la société égyptienne et provoqué de profonds changements. Grâce à leur technologie, l’Egypte a ainsi pu devenir une grande puissance industrielle indépendante et bouter hors de son territoire les Ottomans et les Anglais.

… originaux…

J’ai beaucoup apprécié les univers de ces deux textes courts en raison de leur originalité et du fait que leur contexte ne soit pas européen : 

  • Les tambours du dieu noir possède un petit côté Steampunk en raison de la présence de dirigeables. Il se déroule aux Etats-Unis, en Louisiane. Hormis Underground Airlines de Ben H. Winters et Je suis fille de rage de Jean-Laurent Del Socorro, j’ai très peu retrouvé ce contexte géographique dans mes lectures.
    La culture créole est ainsi très présente dans le récit :
    – notamment par la présence de fêtes comme le Mardi gras à la Nouvelle Orléans au cours de laquelle les habitants se déguisent avec exubérance. 
    – mais aussi l’accent très prononcé de la capitaine Ann-Marie. Et là, je dois dire que la traductrice Mathilde Montier a du mérite car cela n’a pas dû être facile à retranscrire en français. Moi-même en tant que lectrice, j’ai parfois eu un peu de mal à appréhender ces passages.
    – De plus, Jacqueline a été enfantée une nuit de tempête et est en quelque sorte « habitée » par une divinité africaine, Oya. 
    – Enfin, la ville de la Nouvelle Orléans est entourée de hauts murs afin de se protéger de violentes tempêtes et de tsunamis (conséquence de l’utilisation de l’arme du « Tonnerre de Shango » dans les Caraïbes). Je n’avais pas pensé à cela au cours de ma lecture mais la référence à l’ouragan Katrina qui s’était abattu en 2005 aux Etats-Unis (l’un des plus forts enregistrés à ce jour) et dont fait mention Apophis dans sa chronique, est très juste. 
  • Dans L’étrange affaire du Djinn du Caire, c’est plutôt la culture orientale qui est mise à l’honneur notamment par la présence de créatures surnaturelles issues des contes arabes comme les Djinns ou les goules. Là encore, je les ai très peu rencontrées en Littérature de l’Imaginaire excepté dans Or et Nuit de Mathieu Rivero et Mélisende de Jérusalem de Jean-Louis Fetjaine. Enfin, la fin du récit rend un petit hommage à l’univers de Lovecraft mais je ne vous en dirai pas plus afin de ne pas vous dévoiler une partie de l’intrigue. 

… et des personnages féminins au caractère bien trempé.

Les personnages principaux des deux textes sont des femmes qui marquent le lecteur par leur indépendance et leur personnalité affirmé : 

  • Dans Les tambours du dieu noir, Jacqueline est une adolescente noire de treize ans qui survit seule dans les rues de la Nouvelle Orléans et dont elle connaît tous les recoins. Elle fait également preuve de clairvoyance quand aux informations qu’elle possède sur l’arme destructrice et préfère ne pas prévenir les autorités de la Nouvelle-Orléans (ces derniers risqueraient en effet de s’en servir et de rompre la paix fragile signée lors de l’Armistice). Au contraire, elle préfère aller les vendre à Ann-Marie en échange de quoi, elle espère intégrer l’équipage du Détrousseur de Minuit pour se forger un avenir.
    La capitaine possède également un fort charisme et a un petit côté « badass » lorsque les circonstances l’exigent. Quand Jacqueline émet le souhait d’intégrer son équipage, Ann-Marie veut avant tout qu’elle fréquente l’école et acquière une éducation. 
  • Dans L’étrange affaire du Djinn du Caire, Fatma El-Sha’Arawi détonne également dans son environnement : elle possède une personnalité très affirmée et un brin provocatrice (en témoignent les vêtements occidentaux qu’elle arbore alors même que les Anglais ont été renvoyés d’Egypte). Elle a dû faire face au sexisme dans sa carrière mais n’hésite pas à bousculer les certitudes de ses collègues masculins comme l’inspecteur Aasim Sharif. Perspicace et intelligente, elle bouscule les évidences et remet en question les apparences. Elle a par exemple des doutes sur le suicide du Djinn et va jusqu’au bout de ses intuitions. 

En conclusion, j’ai apprécié le recueil des Tambours du dieu noir de P. Djéli Clark : les deux textes se déroulent dans un contexte géographique original, possèdent un univers très travaillé et complexe tandis que les personnages féminins sont charismatiques et ont une personnalité très affirmée. Seul petit bémol pour la première novella, j’ai mis un peu de temps à rentrer dedans ; quant à la seconde, j’ai été moins réceptive à la référence lovecratienne mais il s’agit d’une pure question de goût. Bref, il y a fort à parier que je m’intéresse dans un avenir proche à la sortie d’une autre novella de l’auteur : Le mystère du tramway hanté à paraître également chez l’Atalante. 

Autres avis : 

Apophis (en VO)

Albédo (en VO)

BazaR

Boudicca

Célindanae

L’ours inculte

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Ombrebones

Cette novella participe au #ProjetOmbre

20 commentaires

  1. […] J’ai apprécié le recueil des Tambours du dieu noir de P. Djéli Clark : les deux textes se déroulent dans un contexte géographique original, possèdent un univers très travaillé et complexe tandis que les personnages féminins sont charismatiques et ont une personnalité très affirmée. Seul petit bémol pour la première novella, j’ai mis un peu de temps à rentrer dedans ; quant à la seconde, j’ai été moins réceptive à la référence lovecratienne mais il s’agit d’une pure question de goût. Bref, il y a fort à parier que je m’intéresse dans un avenir proche à la sortie d’une autre novella de l’auteur : Le mystère du tramway hanté à paraître également chez l’Atalante. Vous pouvez retrouver ma chronique complète ici.  […]

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  2. Je note tes petits bémols pour réduire un peu mes attentes. J’ai vraiment hâte d’avoir l’occasion de lire cet auteur personnellement. Les thèmes, les personnages, les références, tout me parle beaucoup.

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